Politique : Liberté d’expression et contenu sensible sur le Web : piqure de rappel
Cet Article est la traduction d'une annonce officielle publiée par Google.
Il y a deux ans et demi, nous avions expliqué notre approche du retrait de contenu des produits et services Google. Ces procédures n’ont pas changé depuis, mais notre récente décision de ne plus censurer nos résultats de recherche sur Google.cn a soulevé de nouvelles questions sur nos pratiques, et sur notre réponse aux demandes de censure des gouvernements. Nous avons pensé que c’était le moment idéal pour une piqure de rappel.
La censure est un problème grandissant. Selon l’Open Net Initiative, le nombre de gouvernements pratiquant la censure est passé de quatre en 2002 à plus de 40 aujourd’hui. De fait, certains gouvernements bloquent maintenant le contenu avant même qu’il n’atteigne leurs citoyens. Même des intentions louables peuvent faire apparaître le spectre de la censure réelle. Les régimes répressifs établissent des pares-feu et anéantissent toute forme de dissidence sur le net.
La montée de la censure gouvernementale sur le Web est sans aucun doute conduite par le fait qu’un nombre record de personnes y ont maintenant accès, et ils créent de plus en plus de contenus. Par exemple, plus de 24 heures de vidéos sont envoyées chaque minute sur YouTube. Cette situation est problématique pour les gouvernements, qui sont habitués à contrôler la presse traditionnelle et les médias de masse. Bien que tout le monde soit d’accord sur le fait qu’il y ait certaines limites à la disponibilité des informations en ligne — comme la pornographie enfantine — nombreuses parmi les nouvelles restrictions imposées par les gouvernements aujourd’hui s’opposent non seulement au principe d’ouverture d’Internet, mais violent également l’article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, qui déclare que “Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit“.
Nous observons ces tentatives de contrôle sous de multiples formes. La Chine est l’exemple le plus frappant, mais ce n’est pas le seul. Les produits Google — la recherche, Blogger, YouTube ou Google Docs — ont été bloqués dans 25 des 100 pays dans lesquels nous offrons nos services. De plus, nous recevons régulièrement des demandes d’agences gouvernementales ordonnant la restriction ou la suppression de contenus de nos services. Lorsque nous recevons de telles requêtes, nous les examinons attentivement pour s’assurer de leur légalité, et si nous pensons qu’elles sont vont trop loin, nous tentons de les restreindre. Dès que possible, nous sommes aussi transparents envers nos utilisateurs par rapport au contenu que l’on nous a demandé de bloquer ou de supprimer afin qu’ils comprennent qu’ils n’auront peut-être pas le fin mot de l’histoire.
Au sein de nos produits, nous traitons le contenu sensible de différentes manières, selon la nature du service. Pour commencer, nous faisons la distinction entre la recherche (où nous listons simplement d’autres pages), le contenu que nous hébergeons, et les publicités. En quelques mots, voici notre approche :
La recherche est le moins restrictif de nos services, car les résultats de recherche reflètent le contenu que l’on peut trouver sur la toile. Nous ne supprimons pas de contenu de la recherche mondiale, à quelques exceptions près, comme la pédophilie, certains liens vers du contenu sous droit d’auteur, le spam, les malwares, et les résultats contenant des informations personnelles sensibles comme des numéros de cartes de crédit. Nous refusons par contre de contribuer à la censure politique. Ce dernier point est particulièrement vrai dans des pays comme la Chine ou le Vietnam qui ne sont pas dotés de mécanismes permettant aux citoyens de remettre en cause les décisions de censure. Nous y réfléchissons avant d’établir une présence physique dans des pays où la censure politique est susceptible d’entrer en compte.
Certains gouvernements démocratiquement élus en Europe et ailleurs ont des lois interdisant certains types de contenus. Notre politique est de nous soumettre aux lois des pays démocratiques — par exemple, celles rendant illégaux tout contenu pro-nazi en Allemagne et en France — et supprimons les résultats de recherche uniquement de nos moteurs de recherche locaux (par exemple google.de en Allemagne). Nous nous soumettons également aux lois de protection de l’enfance dans des pays comme l’Allemagne en retirant certains contenus reconnus comme inappropriés pour les enfants ou en activant par défaut Safe Search, comme en Corée. Dès que nous retirons du contenu, nous affichons un message à destination de nos utilisateurs indiquant que X résultats ont été retirés afin de respecter les lois locales et nous signalons les liens supprimés sur chillingeffects.org, un projet à l’initiative du Berkman Center for Internet and Society, qui archive les restrictions de la liberté d’expression.
Les plate-forme hébergeant du contenu, comme Blogger, YouTube et Picasa Albums Web ont des conditions d’utilisation indiquant ce qui est, et ce qui n’est pas, permis sur ces sites. Un bon exemple de contenu que nous n’autorisons pas est le discours haineux. Notre application de ce type de règlement résulte en davantage de contenus supprimés de ces plate-formes que sur la recherche. Blogger, en tant que plate-forme entièrement dédiée à l’expression, est l’un de nos services les plus ouverts, autorisant par exemple la pornographie légale, tant que cela reste dans le cadre de nos conditions d’utilisations. YouTube, en tant que communauté encourageant le partage, les commentaires et autres interactions entres utilisateurs, est doté de règles communautaires définissant son propre cadre. Par exemple, la pornographie n’est absolument pas autorisée sur YouTube.
Nous essayons de faciliter au maximum le signalement de contenus enfreignant nos règles par les utilisateurs. Voici une vidéo expliquant comment signaler une vidéo sur YouTube. Nous surveillons le contenu signalé sur tous nos produits 24h par jour, 7 jours par semaines afin de retirer le plus de contenus offensants possible. Et s’il y a des lois locales qui interdisent du contenu que nous autorisons en temps normal, nous interdisons l’accès à ce type de contenu uniquement dans le pays en question. Par exemple, en Turquie, les vidéos insultant le fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Ataturk, sont illégales. Il y a deux ans, nous avons été averti de la présence d’un tel contenu sur YouTube, et l’avons bloqué en Turquie. Un tribunal turc nous a demandé de bloquer ce type de contenu partout dans le monde, ce que nous avons refusé de faire, argumentant que les lois turques ne peuvent s’appliquer en dehors de la Turquie . Résultat, YouTube a été bloqué dans le pays.
Enfin, nos produits publicitaires ont les règles les plus strictes, car ce sont des produits commerciaux destinés à générer des revenus.
Ces règles sont en constante évolution. Les décisions de permettre, de restreindre, ou de retirer du contenu de nos services nécessitent souvent des injonctions judiciaires. Nous avons souvent débattu de la bonne marche à suivre, que ce soit à propos de nos règles encadrant nos produits, ou de notre résistance aux requêtes des gouvernements. Au final, nous appliquons les principes qui sont au coeur de tout ce que nous entreprenons.
Nous l’avons souvent répété par le passé, mais en ces temps difficiles, il ne fait pas de mal de nous répéter encore une fois : nous avons un parti-pris pour la liberté d’expression de chacun. Nos actions sont conduites par une croyance que plus d’informations impliquent plus de choix, plus de liberté, et au bout du compte, plus de pouvoir pour chaque individu.
Par Rachel Whetstone, Vice Présidente, Communications mondiales et affaires publiques